Baclofène or not baclofène

Une consommation excessive d’alcool tue 49 000 personnes par an. Toutes ces personnes ne sont pas dépendantes à l’alcool. Elles dépassent les seuils de consommation à risque de trois unités d’alcool par jour pour les hommes et de deux pour les femmes. Il y a donc bien une différence entre usage à risque ou nocif et usage « maladif » ou dépendant de l’alcool.  Après avoir sous la pression de groupes de patients et de médecins accepté de placer le baclofène sous RTU, l’ANSM vient de convenir que les critères de prescription du baclofène étaient bien trop restrictifs et ne permettaient en aucun cas un suivi réel de ces effets. L’agence va ré examiner la question.

Le Baclofène est destiné aux patients dépendants à l’alcool c’est-à-dire ceux qui ne peuvent se passer d’alcool et qui doivent être aidés pour atteindre une abstinence ou une consommation à moindre risque. Il ne faut pas en effet confondre limitation des risques avec sevrage. L’absence de consommation n’est plus aujourd’hui pour la plupart des experts l’objectif prioritaire.

Pyramide de Skinner adaptée par Batel&Michaud, Source : Dr Marc Kreuter/Philippe Batel, Dossier L'Alcoolisme, Le généraliste no.2358

La lutte contre la dépendance flirte trop souvent dangereusement avec une vision morale et affective. Le rôle des acteurs de santé n’est en aucun cas de poser un jugement ou d’avoir une analyse politique, sauf à obtenir les moyens thérapeutiques et financiers pour pouvoir soigner. Dans le cas de la dépendance à l’alcool l’objectif est d’obtenir que le patient ne soit plus obsédé par sa consommation d’alcool et puisse sortir de ce piège mortel de la prise de la décision du matin : «non je ne boirai pas », de sa lutte épuisante de la journée contre la nécessité qu’il a de boire ; pour finir par la consommation compulsive du soir et le constat dépressiogène d’être incapable de se maîtriser.

Les médecins prescripteurs du baclofène ont constaté que celui-ci permettait l’acquisition d’une indifférence à l’alcool qui favorisait une abstinence non contrainte voire une consommation à moindre risque.

Le baclofène ne doit pas être considéré comme la solution, mais comme une solution. Il doit donc bénéficier des mêmes droits de prescription et de suivi que tout autre médicament. Ce n’est pas parce que cette solution a démontré à la fois ses succès et ses limites, grâce à l’action constante de patients convaincus et de médecins innovants qu’elle doit être ostracisée ou a contrario placée sur un piédestal.

Agir contre la consommation excessive d’alcool